L’histoire de la fripe

  • Temps de lecture :3 mins read

Habits à vendre et vieilles guenilles !
L’histoire de la fripe.

Au coeur d’une ère dont la conscience écologique semble plus que jamais dans les esprits, où la mode s’impose comme la deuxième industrie la plus polluante, la seconde main est devenue l’une des alternatives les plus faciles pour consommer de façon éthique et écologique.

Retour sur un phénomène plus vintage que tout ce que l’on peut y dénicher. 

 

Nous sommes au 19e siècle, et jusqu’ici le vêtement reste un véritable luxe

Tout le monde n’a pas de quoi payer du tissu neuf, et encore moins les services d’un tailleur ou d’une couturière. Seule une minorité de privilégiés peut alors se permettre de renouveler sa garde robe, de suivre la mode et ses caprices. Le vêtement apparait comme un cadeau de prix, qui s’offre au sein des familles royales, puis qui se donne, lorsque le vent de la mode a tourné, aux serviteurs et aux vassaux. Ces derniers à leur tour, troquent, vendent ou échangent ces toilettes, qui peu à peu descendent dans l’échelle sociale à mesure que le textile se tache et se délabre


Honoré Daumier « Le Marchand d’habits » 1840.
Eustache Bérat « Vieux habits! Vieux tromblons! » 1846.

 

C’est entre ces divers héritages que font irruption les fripiers. Ces vendeurs de rue parcourent les villes à la recherche de vêtements, qu’ils rachètent à des particuliers ruinés ou des serviteurs chanceux. Les plus sournois d’entre eux sont même accusés de vendre des marchandises volées, ou récupérées dans les morgues ou maisons de familles endeuillées.

On leur reconnait un talent pour maquiller ces frusques et leurs défauts. Mais malgré cette mauvaise réputation de brocanteur sous le manteau, le fripier reste, pour certains, le seul moyen de se procurer un vêtement.

F.Baptiste « Le Marchand de culottes » c.1900

 

L’ampleur est telle, qu’on construit en 1811 les hangars du Carreau du Temple, regroupant pas moins de 1880 échoppes de fripiers qui composent le marché aux vieux linges.

Ses allées divisent le lieu en quatre « carreaux » différenciés les uns des autres selon les type d’articles vendus. 

Le carré du Palais-Royal, se spécialise dans les soieries, les rubans et articles de mode en bon état, et sera principalement fréquenté par les bourgeois économes. Le carré de flore vend du linge de maison, celui de la Forêt-Noire de la maroquinerie. Le carré du « Pou-Volant » (qui donnera le terme « Marché aux Puces » ) est celui qui offrira au lieu sa réputation la plus douteuse. On y retrouve la classe la plus modeste, à la recherche, parmi les guenilles entassées, de chemises ou culottes pas trop usées à moindre coût. 

Charles L’Hôpital & Cie, c.1890
Edouard Antoine Renard « Le Pavillon de Flore » c.1850.
Neurdein Frères « Les Marchés de Paris » 1905.

Mais ce marché de la défroque et ses odeurs de déjà-porté inquiètent. 

Avec le culte de l’hygiénisme et l’arrivée des premiers Grands Magasins on ne veut plus aller « aux puces ». On craint la contamination de diverses maladies et nos brocanteurs d’habits seront bientôt délaissés au profit des vêtements dits « Tout Faits » qui deviendront notre prêt-à-porter actuel

C’est seulement en 1960 que le marché de la seconde main connait un nouveau départ. S’imposant comme contestation envers une société de consommation grandissante, la fripe sera l’emblème d’une révolte contre l’uniformité et la bourgeoisie

Neurdein Frères « Marchands de vieilles chaussures au Marché du Temple »

clara riff