À 100 ans de nous, le pyjama (suite)
Coco Chanel fit du pyjama l’habit de plage par excellence dans les années 20.
Mais très vite, il s’intimise et devient une pièce d’intérieur distinguée.
Jusqu’ici, le pyjama, ou la robe de chambre, est un vêtement exclusivement masculin.
Son utilisation est spécifique, mais celle ci n’est pas liée au sommeil; car oui, on ne dort pas en pyjama, on dort en vêtements du dessous.
C’est l’arrivée du chauffage dans les foyers qui popularisera le vêtement d’intérieur, qui est alors à l’époque l’intermédiaire entre le jour et la nuit. Elégamment orné, le pyjama contraste avec le costume de jour qui est, lui, particulièrement austère. Monsieur enfile le pyjama sous sa veste fumeur, afin de pouvoir se prélasser, sans pour autant froisser son habit de journée. Il restera longtemps une option luxueuse, car il est exceptionnel de posséder des vêtements à l’usage aussi spécifique que le confort…
C’est peut être cette inaccessibilité sexiste qui charmera Coco Chanel, et une génération de femmes avec elle. La préciosité des étoffes, l’androgynie, et le fait que les seuls autorisés à se prélasser dans des chemises de rayonne soient les hommes; autant de choses qui font du pyjama un symbole de libération, désormais adopté par les femmes.


Alors que la mode aspire à une simplification des coupes, en recherche de confort, les textile eux, s’enrichissent de motifs et ornements riches.
L’émigration Russe vers la capitale apporte les motifs et broderies slaves, la découverte de la tombe de Toutankhamon popularise l’iconographie égyptienne, ses scarabées, ses oiseaux et cascades de perles dorées.


Mais c’est un engouement pour le Japonisme et le folklore Indochinois qui aura la plus grande influence sur le vêtement de chambre. Les filatures lyonnaises se mettent à la fabrication d’étoffes de soies et brocards, imprimées, tissées ou ostentatoirement lamées d’or et d’argent. Le manteau kimono en soie japonais est rendu populaire par le designer Paul Poiret, s’inspirant du Ballet Russe. Mais rien n’égalera la somptuosité des pièces importées d’Inde et de Chine par les plus riches clientes. La tendance est lancée, et la fabrication française permet aux classes plus populaires de satisfaire leur envies d’exotisme.

Jusqu’ici, le vêtement de nuit, était une robe longue de coton tombant sur la cheville, réalisée de la même manière depuis l’ère victorienne; les femmes se réjouissent de cette évolution vers des modèles plus légers, gagnant en séduction, leur permettant de se réapproprier leur corps et leur féminité.
Se développent alors plusieurs variantes de pyjama; on les appelle « Négligé » « Peignoir » ou « Kimono ». Tantôt portés dans l’intimité de la chambre après le repas, tantôt jetés sur un fond de robe de satin pour jouer au mahjong, ou en tant que veste fumeur lors de riches réceptions… La sensualité du pyjama en fait un élément phare de toute garde robe, il offre aux femmes le sentiment d’être une véritable idole de cinéma à la maison, à l’image de Carole Lombard et autres Claudette Colbert…
La chemise de nuit est l’élément central de la tenue d’intérieur. Proche du sous vêtement, elle est de soie, de jersey ou de batiste, déclinée dans des teintes chaire, rose, blanc ou pêche. Elle se pare de broderies ou de bordures de dentelles timides, qui, avec les années, dévoilent de plus en plus le corps.



En été, on enfile par dessus, le négligé. Sorte de tunique faite de tissus riches, comme le velours, le satin ou la crêpe, les manches sont imposantes, et décorées de garnitures voluptueuses, de franges ou de volants.


La veste kimono est plus généralement faite de soie épaisse, sur laquelle se déploient d’imposants motifs asiatiques: des bambous, des oiseaux, des compositions florales… On importe de Chine le col mandarin et du Japon l’encolure châle. L’ensemble est ceinturé à l’aide d’une bande d’étoffe assortie, que l’on retrouve également sur les robes de maison et peignoirs, plus modestes, faits de coton ou de flanelle.

À l’origine, associé aux femmes aux mœurs légères, qu’elles soient actrices ou prostituées le pyjama devient le vêtement d’une oisiveté luxueuse, garant de confort et d’élégance.
Source infinie d’inspiration pour les futurs créateurs, il est une pièce emblématique de la femme fatale au cinéma, habille des décennies durant, les plus grands noms tels que Hepburn, Monroe ou Dietrich.
Bien loin de notre pyjama actuel, généralement associé au cocooning honteux à la Bridget Jones …
clara riff