Monstrueuses merveilleuses

  • Temps de lecture :2 mins read

Monstrueuses merveilleuses

Nous sommes le dimanche 10 Mai 1908, foule se presse sur l’Hippodrome de Longchamp ! Aujourd’hui c’est jour de course, un évènement majeur du calendrier parisien. Les grands prix hippiques sont une occasion pour les grandes dames, bourgeois, acteurs, courtisanes et autres personnalités de se voir, mais surtout de se faire voir. 

On y repère les dernières modes, on y présage les prochaines …

 

Sur le terre-plein de l’Hippodrome, trois femmes apparaissent, foulant nonchalamment l’herbe parfaitement taillée, attirant tous les regards sur leur passage.

Scandale ! Celles ci sont vêtues de longues robes de jersey de soie, dont l’élasticité souligne à la perfection les formes de leurs corps. Les plus proches témoins de la scène, rapporteront même qu’elles ne portaient ni sous-vêtements, ni corset, ni jupon. Plus audacieuses encore, ces robes étaient fendues jusqu’aux genoux et présentaient un décolleté des plus révoltant. 

Les trois « Merveilleuses » sur l’Hippodrome de Longchamp, 1908
Couverture de l’Illustration, 16 Mai 1908

Rien, rien d’autre que leurs corps réels et naturels ne se dévoilaient alors sous ces créations, qualifiées de « monstruosités » par le journal L’Illustration. 

C’est ce même journal qui dédiera sa couverture à ces « Nouvelles Merveilleuses »  dont les robes changeront à jamais le monde de la mode, éveillant la nouvelle silhouette du XXe siècle.

Nombreuses étaient les jeunes femmes aspirant à se détacher des robes victoriennes rigides, de leurs corsets en S populaires à la fin de siècle. L’impertinence de ces « fabuleuses divas » établit le nouvel idéal du corps féminin, qui fera couler de l’encre dans les presses nationales.

Créations Jeanne Margaine-Lacroix, 1909

La robe fut nommée par les médias « La robe directoire » suite aux divers accidents de la route qu’elle aurait provoqués. Parmi eux, une collision violente entre le cheval de Winston Churchill et un cavalier distrait, qui se serait retourné en selle pour surveiller « l’apparence sensationnelle » d’une jeune actrice en plein coeur de Londres… 

Robes Margaine-Lacroix, Les Modes, 1909

Malgré tout, le nom de Jeanne Margaine-Lacroix, fameuse créatrice de l’objet du scandale, sera à l’époque laissé hors des gros-titres au profit de Poiret ou Vionnet. Trop excentriques, trop choquantes peut être, c’est pourtant ces robes, ces « monstruosités » qui insuffleront un changement libérateur dans le vestiaire féminin du début de siècle. 

Robes Margaine-Lacroix, Les Modes, 1909

clara riff